Misia ignore si vous allez la croire. Mais en tout cas, elle certifie que la naissance de cette nouvelle a un fonds de vérité incontestable. Et qu’il fallut vigoureusement nettoyer le délire canin après cette aventure. Que pour sa part, elle aima beaucoup. 

Et avec cette manie dont on n’arrivera jamais à la lui faire perdre, elle vous propose pour agrémenter sa prose, trois petites pensées glanées dans ses lectures : 

Une citation extraite de La République des corbeaux de José Cardoso Pires : « Dieu créa le chien, et comme celui-ci ne le lâchait plus d’une semelle, il créa l’homme pour s’en libérer ».

Une autre tirée de La neige et la faute de G. Pressburger : « Ces années-là vivait dans la ville un jeune poète qui apprit à son fils non pas à parler, mais à aboyer. Ce poète mourut à 22 ans de faim. Les derniers temps, il vivait dans une grotte. J’aurais été reconnaissant à mes parents s’ils m’avaient épargné la peine de commander à mes lèvres, à mes poumons, à ma langue, s’ils ne m’avaient pas obligé à émettre les sons qu’ils me répétaient inlassablement. J’aurais préféré aboyer moi aussi, exprimer uniquement la colère et la satisfaction : on m’en empêcha. Ils ont voulu m’enseigner toutes les astuces de la langue. » Il y a plein de belles choses après ces phrases mais la référence au chien s’estompe. Alors Misia a un peu tronqué le paragraphe…

Et la troisième serait beaucoup trop longue à vous résumer. Alors Misia vous invite à jeter un œil sur Le destin des souvenirs de Svevo Italo et vous vous arrêtez à la nouvelle intitulée Journal du chien Argo. Vous m’en donnerez… des nouvelles. Oui bon, d’accord, c’est un jeu de mots stupide. Mais pour une fois que Misia a le cœur léger, vous ne pourrez pas lui en vouloir.

Où l’on rappelle l’oubli du chien.

En ce jourd’hui, le regard d’Adèle tombe sur le chien. Et son regard, au chien pas celui d’Adèle, ce regard couleur de mirabelle écrasée est posé sur Adèle. Le chien ne bouge pas d’un iota. Parfaitement statuaire, le museau entre les pattes, les pattes rangées sous la queue, la queue en ovale rétréci, l’ovale étroitement resserré, tapi, en attente, mais d’une attente désabusée, vaine, et non de cette attente nerveuse où l’on suppute le saut plein de vigueur et d’allant du partenaire. Vaincu il est le chien, et la truffe, bien humide, repose, amorphe et vide, dans le néant d’une existence interminablement longue et sans intérêt. Ainsi est le chien, au poil couleur de mirabelle immature : ça s’harmonise avec ses yeux, plus soutenus, plus sombres, d’autant plus inquiétants. Pourquoi est-ce qu’Adèle l’avait appelé Caramel ? Mystère. Mirabelle aurait été plus approprié. 

« Et alors, je t’ai oublié ! Ce n’est pas la première, ni la dernière. Et c’est pas la peine de tirer une tronche pareille. À ton âge, tu peux tout de même te retenir et attendre un peu pour aller pisser, non ? Je mange, je regarde mon émission et je te sors. Ça te va ? »

« Faut bien ! Ai-je vraiment le choix ? » se dit le chien. Il a levé les yeux un peu plus haut que le sommet du crâne d’Adèle et contemple le plafond, philosophiquement mélancolique. Adèle comprend qu’il a compris : d’ailleurs, imperceptiblement, le bout de la queue attire un soupçon d’énergie qui envoie un léger mouvement ascendant sur l’extrémité extrême de ladite queue. En lorgnant de très près, la queue s’est soulevée, léger, léger. 

Où l’on rappelle l’arrivée du chien.

Adèle, en fait, adore le cabot. Espèce de chose qui s’est attachée à elle, un jour où elle se promenait dans la forêt, la petite forêt (enfin le nom est un peu gonflé pour décrire quelques touffes de noisetiers harnachés à des hêtres gringalets et à des résineux squelettiques et roussâtres, avec quelques fougères qui agrémentaient le tout et des ronces pour y ajouter une touche de sauvagerie bucolique).

Au bout du chemin, en ombre chinoise, une silhouette… Adèle n’avait pas apprécié et s’était justement inquiétée. Elle avait lu, avec anxiété, qu’en cette période de chasse, beaucoup de clébards se perdaient en courant après la bête levée et qu’il leur était ensuite impossible de retrouver la meute et/ou le maître. « Connes de bestioles », avait pensé Adèle. « Et le flair, alors, à quoi ça sert ? »

Le mauvais de l’histoire, c’est que ces chiens redevenaient sauvages, erraient dans la campagne et détroussaient les poulaillers de leurs volatiles caquetants. Et si on les rencontrait dans la sombre forêt, mieux valait rebrousser chemin ou s’écarter prudemment. Encore mieux, s’armer d’un solide bâton de noisetier en cas d’approche musclée d’un de ces monstres. Adèle ne discernait pas de bave dégoulinante, de pupilles rouges infectées de pus, ni de taches brunâtres sur un pelage plaqué et craquelé de saletés et de broussailles. Sinon, elle aurait fait demi-tour. Mais le chien était à contre-jour, elle le voyait mal. Apparemment, l’animal était tranquillement vissé sur ses quatre pattes. Certes au milieu du chemin, mais Adèle pouvait bien contourner.

Elle ramassa une branche de quelque chose au cas où… Et marcha à la rencontre du chien, toujours immobile. C’est quand elle le vit de près que son cœur se mit à battre, qu’un sourire crispé remonta ses lèvres d’une drôle de manière et qu’elle sentit une bonne grosse bouffée de chaleur lui mouiller les aisselles et les reins ! Fichtre, l’animal semblait sortir d’un film d’horreur. Trop tard pour reculer. D’autant qu’alors, la créature infâme lui aurait sauté dans le dos, lui cassant sûrement la nuque !

Frontal affrontement. Adèle flanqua le bâton devant elle : protection un peu minimaliste quand on y pense. Mais bon, on pouvait espérer que la dissuasion fera son effet. Regard sur le bâton : mince, fragile, un peu tendre et sans épines aucune, bref, un petit bâton pour amuser les enfants et titiller les sauterelles dans leurs trous.

Les adversaires étaient face à face et le chien restait statue de marbre pourri. Adèle était à sa hauteur : « Dieu, qu’il est laid et qu’il pue ! » Adèle contourna le fauve en s’arrachant le blouson aux ronces. Contourna, puis marcha à reculons. Le chien suivit du regard et, sur place, tourna la tête, le corps, se retrouva face à Adèle qui reculait.

Et ce fut alors que le chien se mit en marche et, face à Adèle, vint vers elle. Il ne la lâchera plus ! Lorsque Adèle en aura assez de se tordre les pieds à force de marcher à reculons et qu’elle se retournera, le chien suivra, docilement. Le long du sentier, du chemin, de la petite route, des rues.

Il traversera aux bonhommes verts et aux feux rouges comme toute bête civilisée et attendra qu’Adèle trouvât ses clés pour franchir, un peu précipitamment, il faut l’avouer, la lourde porte cochère. Il grimpera lestement les escaliers, s’essuiera les pattes au paillasson, refera un peu de forcing au franchissement de la porte de l’appartement et, très content de lui, ira se coucher sur le tapis persan, à côté du radiateur et de la console à la jarre chinoise (un objet d’art…). Adèle, prudemment, déplacera la jarre chinoise…

Où l’on reprend l’oubli du chien.

Depuis l’automne, le chien est là. Adèle l’a nettoyé, pansé, nourri, caressé, chouchouté. Le chien a l’air de s’en porter fort bien, n’aboie pas, n’aboie jamais, ne montre aucun signe d’impatience et a repris forme canine. Mais aujourd’hui, Adèle l’a tout simplement oublié. 

Elle a d’autres préoccupations, elle ne se sent pas bien. Elle aimerait que Jean, son feignassoux de compagnon, lui donne un coup de main. Ne serait-ce que pour sortir le chien. Mais voilà, Jean n’aime pas le chien et le chien lui rend bien : les deux mâles ne se regardent jamais. Le chien fait semblant de dormir quand il sent que Jean le scrute et Jean détourne les yeux quand il sent peser sur sa calvitie naissante la vacuité liquide des prunelles dorées du chien 

C’est la toute première fois qu’Adèle l’a oublié et le chien est tout gonflé de reproches. Il a compris qu’il était une nouvelle fois en sursis et que le monde nouveau qui se construisait autour de lui était aussi imprévisible et mouvant que les autres. L’errance allait recommencer et il le sentait, il le prévoyait, il l’appréhendait sans vraiment de peur, mais avec un chagrin intense. Il était tout prêt à retourner dans les bois et à attendre quelqu’un d’autre. Au jour et à l’heure où Adèle le désirait. 

Où l’on comprend qu’Adèle a complètement oublié le chien.

Le chien s’en doutait un peu mais ça s’est passé tellement vite qu’il en est tout transi. Un jour, elle était là. Présente, attentionnée. Un autre jour, plus là. Au milieu, un drôle de regard mi-contrarié, mi-innocent, mi-t’as qu’à te débrouiller.

Le chien est tout plein d’incompréhension. D’autant que sa vie a changé. Il n’a maintenant plus le droit de monter les escaliers, de franchir la porte de l’appartement, encore moins de se vautrer sur le tapis persan dans l’aura du radiateur tout ronronnant. Aussitôt la lourde porte cochère dépassée, Jean ouvre, au fond du vestibule, près de l’escalier, un autre petit portail qui grince et zou, il enlève la laisse, donne un coup de pied au chien et referme le portail, laissant le chien dans une sorte de cour/jardin/enclos à poubelles/vélos/trottinette/poussette de gosses. Vaguement carrée. 

Mais ce qui intéresse le chien c’est le mur à l’est, plus bas que les autres grands murs des immeubles qui borde la courette. Il le lorgne ce petit mur. Il se risquerait bien à sauter par-dessus. Peut-être qu’ainsi il retrouverait Adèle ? 

Où l’on ne peut que constater une grande inimitié entre Jean et le chien.

« Mais qu’est-ce qu’il est con ce chien ! Et en plus il sait même pas aboyer ! Il sert à rien ! » Une fois dans la journée, à heures irrégulières, Jean lui apportait une gamelle avec des trucs mangeables et lui remettait de l’eau dans une coupelle. Une fois dans la journée, à heures irrégulières, Jean ouvrait largement le portail, lui attachait la laisse au cou, passait la grande porte cochère et l’emmenait se promener. Enfin se promener ! Toujours le même parcours, les mêmes connaissances, les mêmes odeurs. Et toujours ce même discours :

« Mais qu’est-ce qu’il est con ce chien ! Et en plus il sait même pas aboyer ! Il sert à rien ! » Tous les jours, à heures irrégulières, Jean se plaignait du chien à toutes les personnes qu’il rencontrait.

Le chien connaissait la chanson. Oui c’est vrai, il ne sert à rien. Et alors devait-il servir à quelque chose ? Oui c’est vrai, il n’aboyait pas, il savait aboyer, mais il n’aboyait pas parce qu’il n’avait pas envie, parce qu’il n’avait rien à dire. Parce qu’Adèle devinait et comprenait sans être obligé de parler et que Jean… c’était inutile. Et puis, ok, il est con. Le chien. Le chien, il est con. Oui, ça, il le savait, chien stupide. Jean lui disait toujours : « jamais vu un clébard aussi con que toi ».

Le chien n’aimant guère les gros mots avait traduit ce con en stupide. Et donc avait admis qu’il était stupide. Stupide pour les deux pattes, mais pour les quatre pattes, non. On ne le tenait pas, parmi ses pairs, pour un Einstein canin, mais il se situait dans une moyenne acceptable. 

En revanche, Jean… quelle différence avec Adèle ! Et quelle galère ! Lourdaud et malpoli, voilà ce qu’il était et le chien détestait lorsque Jean rencontrait d’autres deux pattes et leur racontait des histoires intimes, qui n’auraient jamais dû sortir de la plus stricte intimité. Des secrets d’alcôve et toujours ce refrain : « je ne sais pas pourquoi je le garde tellement il est con. Mais bon la SPA est débordée. Je vais pas leur fourguer un boulet pareil. « 

Quand le chien entendait tout cela, son beau regard de paille mûre se ternissait et l’oreille s’affaissait. Il en aurait bien sangloté si la laisse ne lui serrait pas tant le gosier. 

Le nœud de l’histoire.

Ce jour-là, un jour banal un peu laiteux, le chien était très content. 

Il avait chié un superbe caca jaune orangé, de cette couleur qu’on voit parfois dans ce que les deux pattes appellent le ciel, et qui est gros, mais très gros, et très chaud, mais alors très chaud. Il supputait que le mot de soleil lui était attribué. 

Et donc le chien avait chié un soleil. 

Jusque-là, tout était normal. La fiente lourde, odorante et fumante, s’étalait pleine de grâce sur le frais trottoir.

Habituellement, Jean farfouillait dans sa poche et sortait un truc transparent dans lequel il enfournait sa grande paluche. Puis il se penchait sur le caca et le fourrait, d’un geste preste, dans le truc transparent. Marrant et très dommageable car de bonnes odeurs se perdaient, mais bon admettons. 

Sauf que là Jean lui tira prestement sur le col et voulut partir rapidement. 

Le chien, pas si stupide que ça, renâcla. Ce n’est pas comme ça que ça se passe normalement, habituellement et, si on commence à changer les rites, ça va être perturbant pour son équilibre. Donc, il refusa énergiquement d’obtempérer et s’enracina dans le trottoir. Puis longuement, amoureusement, chouma la bonne odeur qui émanait de ce caca fumant. Et pensa que c’était bien dommage que personne ne puisse en profiter. 

Derechef, il leva la patte et arrosa cette belle crotte pour qu’elle continuât à vivre, à s’épanouir. Peut-être germerait-elle et plein de petits cacas bourgeonneraient et se répandraient. Une jolie famille que beaucoup de ses congénères apprécieraient à sa juste valeur. Ils viendraient le remercier de ce cadeau somptueux, qui permettrait de perpétuer leur race. Leur espèce. 

Jean tirait toujours sur la laisse avec de plus en plus d’énergie.

Le chien s’arcboutait et refusait tout net. 

Plus le chien était ancré dans son refus de bouger et plus Jean devenait nerveux et teigneux.

Alors une idée de génie fusa dans la cervelle du chien. Déjouant la volonté de Jean qui croyait qu’enfin le chien allait obéir, il se mit à piétiner son beau caca de ses pattes dodues et coussinées.

Car enfin, mettez-vous à la place de ce chien : non seulement Adèle l’avait abandonné sans lui donner aucune raison, mais maintenant Jean refusait de jouer le jeu, refusait d’agir comme tous les jours, même à heures irrégulières, refusait de sortir le truc transparent, refusait de s’occuper de sa bouse charmante ? Et bien lui aussi, il ne va plus jouer, il ne va plus faire comme les autres jours, il va désobéir, transgresser et vas-y donc, belle purée, odorante qui plus est ! Et que je macule tout ce que je peux attraper, et que je patouille, je patouille, j’explose, et je fais vite comme le presse-purée de Madame. La valse, le délire, la joie. Oh boudiou, le chien s’explose de joie. Il n’avait jamais fait ça… quoique souventes fois l’envie lui en prenait, mais il se tenait bien puisque les deux pattes aussi. Mais là, le deux pattes, ce Jean malotru et incivil, rompait la chaîne de la civilité, alors lui aussi, modeste chien, il allait cisailler menu toutes les règles et bousiller la bienséance. Tel deux pattes, tel quatre pattes !

On y va ! 

Tiens, Jean s’avère mécontent, mais alors très mécontent. 

Il y en a partout, de son beau caca odorant et couleur de miel. Et, chouette, un de ses congénères, un peu trop mufflé et grisou à son goût mais bon peu importe, tire comme un forcené sur sa laisse, son deux pattes freine et refuse, mais la force de notre race, de notre espèce, l’emporte et nous dansons maintenant tous les deux, en rond et en spirale dans la bonne purée. 

Et tout autour d’eux, il y a des deux pattes qui rient, qui s’étranglent, des quatre pattes qui voudraient venir à la fête, des chats qui se barrent en hurlant et des mouches qui bourdonnent d’aise. C’est la fête ! 

La joie fut de courte durée. On nous sépara. On nous obligea à quitter la scène. Plus tard on nous nettoya, nous gronda, nous priva de croquettes. Le chien dit « nous », car il est persuadé que son copain a subi le même sort que lui, peut-être en un peu moins brutal car son deux pattes à lui avait l’air plus navré et dépité que vraiment mécontent. Alors que son Jean, ouille, ouille, la dérouillée. 

La fin de l’histoire.

Deux jours plus tard, le chien décida de se faire la belle. Depuis le jour de grande joyeuseté, Jean lui avait lancé ses croquettes à la gueule, lui avait crié que non seulement il était stupide mais qu’en plus il était taré et que si ce n’était pas pour honorer la mémoire d’Adèle, il lui flanquerait une balle dans le fondement.

Le chien fut très perplexe. Par principe, une balle, on se la joue avec le museau, pas avec le derrière. Mais il comprenait vaguement que peut-être Jean souffrait. En mémoire d’Adèle ? Cette phrase était étrange. Dommage qu’il n’ait pas eu le courage d’aboyer, peut-être que Jean il aurait apprécié ? Maintenant c’était trop tard. Il leva la truffe vers l’étage où là-haut un carré de lumière indiquait, au naufragé qu’il était, la maison d’Adèle et de Jean, le radiateur ronronnant, le tapis persan, les volets encore ouverts. 

Un peu plus haut, le chien, constatant qu’Adèle l’avait oublié, avait « compris qu’il était une nouvelle fois en sursis et que le monde nouveau qui se construisait autour de lui était aussi imprévisible et mouvant que les autres. L’errance allait recommencer et il le sentait, il le prévoyait, il l’appréhendait sans vraiment de peur, mais avec un chagrin intense. Il était tout prêt à retourner dans les bois et à attendre quelqu’un d’autre. Au jour et à l’heure où Adèle le désirait. Et aujourd’hui, au jour et à l’heure où Jean le désirait. 

C’est donc d’un cœur léger qu’il décida de ficher le camp. Il aurait dû le faire plus tôt d’ailleurs, prendre l’initiative et ne pas attendre que Jean le décidât pour lui. Il avait un peu trop traîné. 

Et il sauta le petit mur et partit à l’aventure. Crotta un peu partout, fit beaucoup de pipis aussi qu’il dissimula en envoyant, de ses pattes arrière agiles et dodues, plein de terre et de feuilles et de tout ce qu’il trouva sur ses traces. Pour les effacer. Pour s’effacer lui-même. Il alla de l’avant et disparut dans le petit bois d’où il était sorti un beau jour, derrière Adèle. 

Au travers des branches, il vit se lever une immense galette blanche et se dit que la liberté devait avoir cette couleur-là. Cette pure couleur de lune brumeuse. 

Alors il aboya.

Quand Jean ouvrit la fenêtre pour fermer les volets, il entendit les aboiements et se dit : « Au moins celui-là, il sait aboyer, pas comme ce crétin de chien ». Vaguement, il chercha à discerner la silhouette du chien dans la cour, mais la cour était trop sombre, trop noire. Et son cœur aussi. 

 

Étiqueté dans :