Il avait vingt ans, elle en avait dix-neuf, presque vingt.

Nous annonçons les personnages : Véra et Simon.

Il avait vingt ans, elle en avait dix-neuf, presque vingt.
(répétition nécessaire en guise de  refrain de notre dit).

Le lieu : le trottoir. Non loin de la maison. De leur maison.

— Zut, j’ai oublié ma carte d’identité !

Dit Simon, tout soudainement. Calant net sa souple démarche.

— File-moi les clés !

 Re-dit Simon à l’adresse de Véra.

— T’as qu’à m’attendre ici le temps que je remonte !

Ajoute Simon, encore plus promptement.

Aussitôt chose dite, aussitôt chose faite.

Véra s’active : les clés sont dans son sac. Elle sait qu’elles y sont. Simon le sait aussi. Les maisons qui bordent la rue éclatante de chaleur le savent également. Qui plus est, les arbres poussiéreux des jardins piteux. Le petit square puant depuis que les toutous s’en servent comme tinettes publiques opine du chef. Le quartier peut le jurer : Véra a les clés de l’appartement, de leur appartement, dans son sac. Mais voilà ! Peut-on nommer sac, cette caverne d’Ali Baba, ce capharnaüm, cette grotte aux trésors où peigne, élastiques, trombones, timbres, papiers divers et variés de tout format et de toutes couleurs, téléphone portable, porte-monnaie, porte-cartes,   deux  porte-cartes, non trois porte-cartes (selon la taille desdites cartes), fleurs en déconfiture, marrons séchés, petits cailloux, graines ratatinées, fossiles sableux, pointes de flèches issues de prospections sauvages, baguettes, poussières… et trousseaux multiples se côtoient, se grimpent dessus et s’entrelacent.

Si nous fûmes long en cette description du contenu du sac de Véra, c’est que nous calculâmes le temps de lecture in interno ou in externo qu’il nous fallut afin de le calibrer sur le temps réel de la recherche de Véra. Sauf que ce n’est pas tout à fait juste mathématiquement parlant, puisqu’il faudrait rajouter à cette plate énumération nombre d’injures et d’interjections fleuries qui ponctuèrent le « farfouillage » (terme ô combien  trivial mais tellement juste, aussi bien par le son que par le sens, tellement évocateur de petites mains aux ongles vernis tournant et retournant, prenant et déprenant,  maniant et lâchant,  faisant valser et revalser tout ce qui se présentait ) précipité et désordonné qui s’ensuivit. Nous n’en donnerons ici que quelques exemples émanant de la bouche solide d’un Simon plus qu’excité : Mais tu peux pas le ranger non, ton putain de sac ? A quoi ça te sert toute cette quincaillerie ? Tu trouves jamais rien alors ! On va tout de même pas y passer la soirée, non ? Magne-toi !

Véra en est toute rouge et exténuée, le sac mollement suspendu à sa bandoulière, agité de soubresauts qui ne rendent pas la tâche facile. Elle cale l’engin sur un de ses genoux dans une pose disgracieuse qui la déhanche et lui donne un air salement penché et déséquilibré. Cheveux en bataille, bouche mordillée, s’aidant de l’acuité d’un regard couleur de pervenche, elle saisit enfin le trousseau idoine et le brandit dans un sursaut de triomphalisme mérité.

— Les v’là !

Dit-elle.  Langage prosaïque, peu digne d’une Véra au teint de porcelaine et mignonne à souhait, mais que nous excuserons à pareille heure, après un tel débordement d’énergie fébrile.

Simon retourne dare-dare sur ses pas et fonce.

Véra le suit des yeux. Simon, ce petit bout d’homme, rencontré sur la pelouse de la fac. Il y a presque un an. Un an déjà. Licence d’histoire pour lui. Licence de géographie pour elle. Des désirs de voyage, de chantiers archéologiques, de découvertes, de publications. Une décision rapide – trop rapide ? – de se mettre ensemble, sorte de colocation amoureuse où faire l’amour est hygiénique et sans risque, la vie commode et moins chère… La mère de Véra assure des petits plats délicats, la mère de Simon renfloue des comptes bancaires un peu platouilles, le père de Véra paie le logement et le père de Simon vient bricoler la plomberie déficiente et l’électricité chaotique. En fait, ils se rendent tous service : les parents ont l’impression de bien s’occuper de leurs progénitures et, jusqu’au bout, d’assurer leurs obligations parentales en grondant ferme par en-dessous et tout sourire en surface et les enfants de vivre libres, heureux, épanouis.

Aujourd’hui, Véra voulait aller au cinéma. Mais Simon voulait aller voir le feu d’artifice. Aujourd’hui, Véra a perdu et Simon a gagné. Demain, il faudra rééquilibrer le jeu et affermir la donne. Donnant-donnant. 

Véra souffle, s’essuie d’un Kleenex sauvé des eaux et pense.  Elle pense à plusieurs choses : il faudrait tout de même qu’elle range ce sac et en ôte le superflu. Mais, superstitieuse, elle hésite à jeter à la poubelle des souvenirs amassés avec tendresse.  Elle va faire le tri. Non, mesquinement, elle demandera à Simon de le faire avec elle : ainsi lui échouera le triste sort des épaves rejetées. Lâche Véra ? Un peu oui, justement, c’est ça être en couple à 20 ans : c’est, sous prétexte d’égalité et de vie à deux, la possibilité égoïste de ne pas prendre de décisions, de demander tellement sympathiquement à l’autre ce qu’il en pense, de faire reposer sur les épaules d’autrui sa propre incapacité à conduire seul(e) sa vie…

Amère considération, direz-vous à la lecture du paragraphe précédent ? Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils sont gais… Certes certes, ajouterons-nous. Si vous les voyez comme cela, dans notre bonne ville, se tenant la main et roucoulant à l’oreille de leurs portables, vous aurez raison. En surface. Mais le soir, eux aussi ils ronflent, eux aussi ils puent du bec le matin, eux aussi ils se mouchent salement, eux aussi ils pètent et rotent. À vingt ans. Malgré leur jeunesse et leur beauté. Déjà des plis, déjà des ornières, déjà des manies, déjà des tics ; nous avons peine à imaginer l’amour à 20 ans, le couple à 20 ans, ancré dans les vaisselles grasses (pas de place pour un lave-vaisselle), les lessives écœurantes (fichues règles et diarrhées chroniques) et les sommeils lourds et chassieux. Nous aurions préféré peindre Simon et Véra dans des ébats fulgurants, des retrouvailles rapides et mystérieuses, des week-ends passionnés, des coups de cœur. Tout cela entrecoupé d’autres aventures, d’autres rencontres, d’autres découvertes.

Le temps de ce paragraphe fut le temps de latence de Véra sur le trottoir. Elle pense qu’elle devrait se laver les cheveux. Et qu’elle doit impérativement rendre un bouquin à la médiathèque. Un bouquin de géo bien sûr. Elle avait dit qu’elle photocopierait quelques pages. Elle demandera à Simon de le faire.

Il avait vingt ans, elle en avait dix-neuf, presque vingt.

 Elle allait tourner sa pensée vers d’autres sujets quand elle entend un « Véra, tu peux venir ? » intempestif. Diable ! Son compagnon requérait son aide. Vite, galopons à son secours !

— « Beau compagnon, me voici. En quoi puis-je être de quelque utilité en ta quête ? Dois-je mener ton cheval à l’avoine ? Dois-je appeler laquais et servantes, qu’un bain chaud te soit coulé et qu’on ôte la fatigue de tes épaules charnues… » dirions-nous.

— Ouais, qu’est-ce quia ? 

Marmonne Véra. Et l’on nous permettra cette fusion orthographique car, malgré la finesse de notre oreille, nous ne pûmes discerner « qu’est-ce qu’il y a ? » dans le gargouillis informe qui sortit des lèvres purpurines et divines de notre poupée Véra.

— Y’a que cette p… de porte s’ouvre pas 

Répond Simon, le chef, le mâle, le puissant, le fort en rogne qui s’arc-boute sur la clé et tente, mais en vain, d’ouvrir la grosse porte rebelle. Une fois de plus que l’on nous pardonne cette liberté d’expression et cette manœuvre habile de ponctuation car nous ne pouvons écrire de vilaines choses sur notre admirable clavier.  Que l’on devine alors ce que Simon hurle… Un mot très courant en six lettres.

— Donne-moi ça, incapable ! 

Et Véra s’empare du trousseau, jugeant que Simon a dû, sans doute, se tromper de clé et qu’il est en train de se fourvoyer gravement. Force est de constater que Simon a vu juste.

— C’est ennuyeux. 

Calmement (semblant…), Véra remet la clé indocile dans le pêne, cherche l’endroit où, normalement, si tout se passait bien, le docile panneton devrait tourner. Elle hésite, fait trembler la clé, l’enfonce, la retire, la tourne (enfin tente de la tourner) d’un côté et de l’autre. Puis la ressort et la regarde, d’un œil de pervenche courroucé et de mauvais aloi.

— Saleté de clé 

Conclut-elle et elle redonne le trousseau à Simon. Qui enfonce, retire etc… Bref, s’active d’exacte façon. Sous le regard de maigre compassion de son amie de cœur.

Le temps passe, menu menu. Par principe, Véra et Simon ont rendez-vous à 18h avec deux autres couples (qu’importe ici les noms) sur la place Stanislas, sous le doigt conquérant du sieur du même nom. Sur une terrasse, on aurait pris une bonne bière, pense Simon, un bon diabolo pêche, pense Véra, bien frais, pensent Simon et Véra et de là, doucettement et rigolottement, en faisant force singeries et cabrioles et bruits retentissants, on s’en serait allé vers le canal zieuter le feu d’artifice du 14 juillet, puisque le 13 juillet au soir nous sommes, et qu’ensuite, toujours doucettement, rigolottement et gloussottement, on aurait été s’en rejeter un autre à une autre terrasse, une bonne bière pense Simon, un bon diabolo pêche pense Véra, bien frais pensent Simon et Véra, à moins d’aller se payer une pizza chez Marco arrosée de chianti (mais au fait, Marco, il ouvre le 13 juillet ?). Ils pourraient aussi fêter en avance l’anniversaire de Véra : c’est le 17 juillet, et le 17 juillet, ils se retrouvent toujours tout seuls, tout le monde est parti. Bon d’accord il y a les papas et mamans. Mais après tout, ce serait sympa de lui fêter tout à l’heure. Ah ben oui, mais le cadeau ?? Là aussi on aura compris que le temps d’écriture/lecture de ce paragraphe correspond pile poil au temps d’essais toujours aussi infructueux de Simon.

Parce que Véra, pendant ce temps, contemple son homme en pleine action. Il est mignon, pense-t-elle en le contemplant. Ce n’est pas une beauté et elle aurait peut-être pu trouver mieux, comme dit sa douce sœur dont la délicatesse de langage est un enchantement… Mais il est sympathique, prévenant, lui achète des croissants pour le petit déjeuner, nettoie l’appartement, nourrit le poisson rouge, et, depuis un mois, rapporte même un salaire. Un petit salaire. Mais Véra en est ravie : sa bourse lui servira dorénavant d’argent de poche et elle pourra, à son rythme indolent et quasi fainéantique, poursuivre des études aussi longues que parfaitement inutiles. La joie d’exister. Ajoutons, pour casser l’ambiance, que l’emploi de Simon est saisonnier et ne durera que le temps des terrasses à l’ombre des marronniers.

Mais là Simon se révèle très acariâtre. Il déçoit Véra.

— Je t’avais bien dit que tu avais fait faire des doubles de clés qui collaient pas.

Dit Simon.

Des doubles qui ne collent pas… Fichu langage. Comme si un double pouvait coller ! Enfin, ne relevons que l’objet du litige et non la forme.

— Je suis allée chez le petit bonhomme du coin qui a toujours fait nos doubles de clés sans problème.

Renchérit Véra.

Qui ajoute ironiquement.

— D’ailleurs, chéri,

Mal placé le chéri : un lecteur attentif le verra tout de suite,

— D’ailleurs chéri je te fais remarquer que ce trousseau n’est pas le mien, mais le tien. Donc ce ne sont pas des doubles de clés, mais les clés, les uniques, les premières, les parents-clés, les…

Simon coupe Véra de manière ostentatoire et peu élégante.

— Mon œil !

— Ton œil si tu veux, mais regarde bien, mon chéri !

Vous voyez la répétition (genre aiguillon qu’on enfonce profond profond jusqu’à ce que mort s’ensuive et l’alliance de « mon œil » avec « regarder ». Manque pas d’à-propos cette Véra.)

Et notre lourdaud de Simon ne peut qu’acquiescer.

— Bon OK, j’avais pas vu.

— Pas grave.

— Pas grave, pas grave, t’en as de bonnes, toi !

— Mais non, pas grave. En fait, c’est juste ta carte d’identité que tu as oubliée ?

— Oui, juste ça, mais un 13 juillet avec tous les zigues qui traînent en ville, j’ai pas intérêt à être arrêté par un poulet.

— Bizarre,

Pense derechef notre fine Véra comme les hommes, lorsqu’un souci germe sous leurs galoches, se prennent les pattes dedans et jurent comme des charretiers. De la décence, quoi ! Et de la prestance. Toujours rester dignes même lorsqu’on est emprisonné par des racines jusqu’au cou. Et là, relativisons.

— J’ai la mienne, moi. Et tu as deux jours je crois pour te présenter au poste si tu n’as pas ta carte sur toi.

— C’est ce qu’on dit.

— Allez, on y va, on verra ce soir.

La phrase à ne pas dire. Qui déchaîne et décuple la colère de Simon. Il veut, il s’entête, il exige. La clé doit tourner. Incontestable qu’il y a un souci, que la sagesse voudrait d’aller à la fête se divertir, puis de revenir avec les amis examiner la situation, au pire dormir chez l’un ou chez l’autre, s’éclater toute la nuit en rigolades et gaudrioles et voir demain ce qui peut être envisagé (même un 14 juillet, on doit bien trouver, sur toute l’agglomération, un dépanneur en serrurerie).

Au fur et à mesure que la sage Véra propose son plan d’action à Simon, celui-ci fulmine de plus belle et s’enflamme tout corps perdu. Point par point, il réfute.

Quoi, aller à la fête se divertir alors que la tête n’y est plus ? Comment s’amuser librement quand on sait que la porte ne s’ouvre pas et qu’on ne peut retourner dans ses chaussettes le soir ?

Quoi, ennuyer les amis en les ramenant devant la porte immobile et la clé indocile pour qu’ils se gaussent de nous et nous tournent le dos ?

Quoi, aller dormir chez l’un ou chez l’autre ? Jouer aux mendiants ? Quémander l’hospitalité ? Se couvrir de honte ?

Quoi, rire et gaudrioler quand on sait que la porte ne s’ouvre pas … etc…(voir supra) ?

Quoi, voir demain ? Qu’est-ce qu’on peut voir demain, quand on sait que le 14 juillet, il n’y a rien.  Strictement rien. À moins d’avoir la fortune de Crésus, comment espérer un dépannage rapide et efficace ? Tout le monde est dehors, un 14 juillet, à s’esbaudir devant des saucisses noirâtres et à faire exploser des pétards dans les jupes des vieilles dames.  Voilà ce que c’est, le 14 juillet. Alors ton problème de clé !

— Alors qu’est-ce que tu proposes ?

— Ah parce que c’est moi qui dois proposer ?

— Euh oui…

— Je te rappelle que c’est toi qui as voulu rejoindre machin chose

— Ils s’appellent Jean, Adèle, Maxence et Cléa,

Là, il faut donner leurs noms car ils deviennent essentiels à l’action,

— Les machins choses. Ils seraient contents !

— OK ! OK ! D’ailleurs ce sont tes amis, pas les miens !

— Menteur ! Tu les connais aussi bien que moi. Pierre et Maxence ne jouaient pas avec toi au jeu de rôle ?

— Oui, mais Adèle et Cléa ? Hein ? Des pouffiasses de la fac !

— Pouffiasses ! T’avais l’air de les trouver à ton goût.

— C’est ça, dis que je te trompe.

Etc…

Il avait vingt ans, elle en avait dix-neuf, presque vingt.

Le lecteur, toujours aussi perspicace, ne pourra qu’admirer la jolie pente descendante qu’empruntent nos héros. Toute lisse et glissante comme chaussée verglacée. Un amour de tremplin exceptionnellement gelé.

Véra a saisi à nouveau le trousseau, brandit le funeste objet par sa tige maléfique et cette fois-ci, c’est elle qui se déchaîne sur la serrure récalcitrante. Mal lui en prend. Entendez-vous ce petit craquement ? Ce bruit ténu certes, mais indiquant nettement une brisure soudaine… Véra retire la clé, une clé pas tout à fait entière, pas tout à fait complète. Bref, il en manque un morceau. Justement le morceau important, le bout de la clé, les crans quoi ! Comment ça s’appelle exactement, Véra n’en sait rien. Et elle reste, penaude, une épave de clé à la main. Sûr que St Pierre aurait du mal à ouvrir le Paradis avec un engin pareil !

La pensée d’un St Pierre, tout suant sous l’auréole, la met en joie, mais Simon est imperméable à ce genre d’humour et demeure bouche bée devant le sourire lumineux de la toute lumineuse Véra qui s’amuse comme une petite follette.

— Cassée, elle est cassée !

Hihiihihihi. Et Véra rit. En hi. Tout pointu. Peut-être que l’on pourrait y discerner une note hystérique. Facilement compréhensible au vu d’une situation hautement dramatique.

— Ah ben c’est malin. C’est le bouquet.

— Tout à l’heure le feu d’artifice. Oh oui. Oh oui.

— Manquait plus que ça. Ah ben t’as gagné !

— J’ai gagné, j’ai gagné, t’avais qu’à le faire, toi ! Au lieu de regarder !

— Regarder ! Tu te fiches de moi ? Depuis une heure que j’essaie de faire tourner ce truc et toi, t’arrives, tu fricotes là-dedans, et tu pètes tout ! Et c’est ma faute ? Non mais là, tu vas t’excuser !

— Hein?

— Tu vas t’excuser, sinon…

Sinon quoi ?

Mon doux Simon, mon amour de Simon. Qu’est-ce qui t’arrive ? C’est quoi cette menace ? Cette main tendue au-dessus de ma joue ? De mon visage si tendre ? Pour une simple histoire de clé ? Faut-il en arriver là ? Ce que je découvre me navre, mon Simon…

Ils se tiennent là. De la main droite, Véra tient encore la clé cassée et elle monte lentement la gauche comme pour se défendre.  Sans y croire vraiment.  Simon abaisse sa main levée et la laisse retomber. Il est là, bras ballants, et la regarde.

— Je m’excuse.

Ils s’assoient alors sur le seuil de la porte.

Sur le seuil de la porte de leur amour, bien close et fermée.  

Ils cherchent en leur âme une autre clé, toute neuve, toute scintillante, en bon alliage de métaux rutilants, au panneton solidement cranté.

Pour tout rouvrir bien sûr, tout recommencer.

Sur le seuil de leur amour déçu, ils seront assis longtemps avant de la trouver.

Ils trouveront des clés d’argile crue qui s’épuiseront à la première pluie. Une clé de cuivre qui durera plus longtemps mais finira par verdir comme vieille algue. Une clé de soie vite déchirée. Des clés d’occasion dans des cadenas usagés. On ne peut pas dire qu’ils n’ont pas essayé, mais voilà, à 20 ans, mieux vaut laisser les portes largement ouvertes que de s’enfermer dans des appartements exigus.

Il avait vingt ans, elle bientôt vingt. Ils ne fêteraient pas leur vingt et un ans ensemble.

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